CONTREPOINT - HARMONIE, HARMONIE - CONTREPOINT

Il était peu probable que des hommes inventassent un jour le contrepoint et l’harmonie, bases de "l’écriture" et de toute méthode en matière de composition musicale. C’est pourtant ce que firent des Européens, plus de quarante siècles après les débuts de la Civilisation. Aujourd’hui, on donne aux plus marquants de ces hommes le nom de grands musiciens ou celui de grands compositeurs.

 

Au contrepoint et à l’harmonie, ajoutez l’étude de l’instrumentation et celle de l’orchestration ; et vous aurez ainsi énuméré les étapes du cursus obligé par lequel doit passer l’élève d’une classe de composition dans une haute école de musique allemande (Hochschule für Musik) ou un Conservatoire National Supérieur à la russe ou à la française.

 

En Allemagne, cet élève apprendra d’abord le contrepoint et ensuite l’harmonie ; en France, ce sera le contraire. Notez bien cependant qu’il existe des compositeurs qui, dans leurs œuvres, ne sont pour ainsi dire qu’harmonistes, et d’autres qui ne sont que contrapuntistes. Dans la première catégorie, et pour s’en tenir aux seuls Français, on peut citer Jean-Philippe Rameau ou Claude Debussy ; pour la seconde, citons Hector Berlioz, Albert Roussel ou Darius Milhaud. Il y a bien sûr, une troisième catégorie : celle de ceux qui ont su tenir la balance égale entre le "feeling" nécessité par l’harmonie, et la "science" impliquée par l’usage du contrepoint. Parmi ces derniers, on citera César Franck et Gabriel Fauré dont l’un des derniers chefs-d’œuvre, le trio en Ré mineur, est un miracle d’équilibre entre les deux manières d’envisager l’art de composer.

 

Mais qu’est-ce donc au juste que le contrepoint et l’harmonie ? Pourquoi est-il nécessaire d’en donner une définition aussi claire que possible au seuil d’une chronologie illustrée de la musique classique européenne ?

 

Le contrepoint et l’harmonie, l’harmonie et le contrepoint, sont deux façons différentes de prévoir l’agencement des sons constituant la pensée musicale, tant dans l’ordre du successif que dans celui du simultané.

 

Le contrepoint se définit comme l’art de superposer et d’imbriquer des lignes mélodiques et de faire en sorte, au bout du compte, qu’une mélodie s’accompagne par elle-même ou par les contrechants qu’elle génère. C’est pourquoi la forme la plus simple du contrepoint est le canon (exemple : "Frère Jacques"), mot dont le moins averti des auditeurs connaît néanmoins la signification. La forme la plus complexe et la plus élaborée du contrepoint s’appelle la fugue, d’un mot évoquant une course-poursuite et la fuite de parties instrumentales ou de voix qui, suivant l’expression consacrée, "se courent les unes après les autres".

 

L'harmonie, tout au contraire, est l'art d'accompagner "le chant" par les enchaînements d'accords qui lui conviennent le mieux. Il faut cependant préciser que le mot "chant", en question ici, est pris au sens métaphorique et qu'il désigne en harmonie la ligne mélodique supérieure d'une composition tant instrumentale que vocale.

 

Sur une partition, le développement d’une pensée musicale de nature contrapuntique s’aperçoit de façon évidente en parcourant du regard celle-ci de gauche à droite. La lecture des accords, elle, s’effectue verticalement et de bas en haut. C’est pourquoi on parlera de pensée compositionnelle horizontale ou horizontaliste pour désigner celle des auteurs plutôt portés au contrepoint (Jean-Sébastien Bach et Paul Hindemith) ou de verticalisme pour ceux qui privilégient la sensibilité harmonique (Franz Schubert et Robert Schumann).

 

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